Après avoir édité un disque dédié à l’œuvre religieuse de Matheo Romero (RIC 271), voici un enregistrement consacré à la musique profane espagnole du compositeur liégeois. Trente et une compositions de ce genre nous sont parvenues ; elles sont dispersées dans divers manuscrits dont la présence est importante en Espagne depuis la fin du XVIe siècle, connus sous le nom de « Cancionero » ; ils sont conservés à Madrid, Rome ou Munich. C’est à la Staatsbibliothek de cette ville de Bavière qu’est conservé le Cancionero de la Sablonara, manuscrit qui contient la grande majorité des compositions de Romero. Ceci atteste de l’importance des fonctions de Romero à la Cour : sur un ensemble de septante-cinq pièces, vingt-deux sont de notre Liégeois.
Originaire de Liège, Matheo Romero fut au service de la Cour d’Espagne sous Philippe II, Philippe III et Philippe IV! Son oeuvre profane illustre sa parfaite assimilation des caractères de la musique de son pays d’adoption. À l’aube de l’époque baroque, ces romances, folias et canciones sont aussi marquées par les affects des madrigaux italiens ; comme dans ces derniers, les textes prennent la nature comme le principal confident des passions et des déceptions amoureuses. Datant des premières années du XVIIe siècle, cette musique se situe à la frontière de la Renaissance et de l’époque baroque, laissant peu à peu place au principe de la monodie accompagnée. Romero aurait été le compositeur du premier opéra espagnol sur un livret de Lope de Vega !
Matheo Romero fut le dernier « fi ammengo » responsable de cette chapelle musicale de la Cour d’Espagne. Mais, en définitive, n’était-il pas devenu tout aussi « espagnol » que les musiciens de l’ensemble dont il avait la direction ? Que de surprises et de découvertes sonores Matheo Romero put-il faire entendre à sa mère, Pascale Loart, veuve depuis pas mal d’années, et qui était venue rejoindre son fils à Madrid à l’extrême fin du XVIe siècle !