« Comme un beau rayon de soleil qui écarte les ombres et révèle des beautés inattendues d’une façade mille fois contemplée, ou donne à une statue l’éclat de la vie, la musique monumentale a besoin d’un éclairage lumineux pour révéler sa merveille. Parmi les monuments musicaux de notre baroque, les Vespro della Beata Vergine de Monteverdi sont une cathédrale à l’universalité complexe. Composées au tout début de la Contre-réforme, ces pages de liturgie révolutionnent la vision de la musique rituelle. C’est visiblement ce que Leonardo Garcia Alarcon semble nous apporter dans cette nouvelle production des Vêpres. »
Pedro-Octavio Diaz, Muse Baroque
Il est des œuvres qui demeurent des monuments, hiératiques, sublimes et dont le mystère ne se transperce qu’à travers le génie ou la ruse. Mais il est aussi des interprètes, des équipes d’exception qui peuvent aborder ces monuments par la délicatesse et l’humilité. Comme un beau rayon de soleil qui écarte les ombres et révèle des beautés inattendues d’une façade mille fois contemplée, ou donne à une statue l’éclat de la vie, la musique monumentale a besoin d’un éclairage lumineux pour révéler sa merveille. Parmi les monuments musicaux de notre baroque, les Vespro della Beata Vergine de Monteverdi sont une cathédrale à l’universalité complexe. Composées au tout début de la Contre-réforme, ces pages de liturgie révolutionnent la vision de la musique rituelle. 10 ans exactement après le bûcher qui ensevelit Giordano Bruno, la musique de Monteverdi semble épouser ses théories universalistes, elle semble infinie dans la louange mais aussi dans les situations, comme si le divin pénétrât ainsi toute chose, chaque fibre du vivant. De la sensualité profonde des psaumes et cantiques aux mystères de la polyphonie quasiment médiévale, chaque chant est un théâtre, chaque cœur se transforme en temple. C’est plus une adoration à la création divine, qu’une flagellation ostensible. Tournant subtilement le dos à la sobriété de Palestrina, au hiératisme d’Allegri ou aux étranges harmonies de Gabrielli, Monteverdi épouse le nouveau souffle baroque dans sa partition. Le madrigal la porte en volutes et nous offre une vision passionnée.
C’est visiblement ce que Leonardo Garcia Alarcon semble nous apporter dans cette nouvelle production des Vêpres. Prises sur le vif dans l’Abbatiale d’Ambronay lors du 34ème Festival d’Ambronay, ce double album revisite un monument du baroque. Cette reprise n’en est pas moins une redécouverte. Leonardo Garcia Alarcon et sa Cappella Mediterranea nous ont habitués à trouver dans les partitions une nouvelle sonorité, retrouver des détails inattendus. En effet, Leonardo Garcia Alarcon, en plus de savoir s’entourer d’une équipe solidement musicienne, sait varier les intensités, créer une ambiance, redonner à ces Vêpres toute leur portée collective, leur message autrement plus sacré que celui d’être une louange au vivant. Le chef argentin puise dans sa connaissance profonde du style baroque les formidables couleurs qui se posent sur chaque note comme sur une toile. Nous saluons encore une fois son investissement et les nuances qu’il nous apporte pour notre plus grand bonheur, mais aussi pour celui de l’œuvre.